S’expatrier au Maroc : régime matrimonial, succession, protection des enfants et procuration – ce qu’il faut savoir

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S’expatrier au Maroc est un projet de vie enthousiasmant, que ce soit pour y travailler, y investir ou y passer sa retraite. Mais au-delà des aspects pratiques liés au logement ou à l’administration, il est essentiel de connaître les conséquences juridiques de ce changement de résidence sur votre vie familiale et patrimoniale. Régime matrimonial, succession, fiscalité, protection des enfants mineurs, procurations… Autant de sujets qu’il vaut mieux maîtriser avant de s’installer pour éviter des situations complexes. Ce guide clair et complet vous explique les principales règles applicables aux Français et aux couples franco-marocains qui s’installent au Maroc.

Quel sera votre régime matrimonial au Maroc ?

Lorsque des époux s’installent au Maroc après leur mariage, ou s’y marient directement, leur régime matrimonial peut être régi par la loi marocaine. À défaut de contrat de mariage, un couple de Français ou un couple franco-marocain domicilié au Maroc sera soumis au régime légal marocain de séparation de biens, même si la règle prévoit en principe l’application de leur loi nationale.

Les règles de détermination du régime matrimonial

  • Mariages avant le 1er septembre 1992 : le régime est déterminé par la loi du « premier domicile matrimonial ».
  • Mariages entre le 1er septembre 1992 et le 29 janvier 2019 : il dépend de la « première résidence habituelle » des époux après leur union, conformément à l’article 4 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978.
  • Mariages après le 29 janvier 2019 : la loi applicable est celle de la « première résidence habituelle commune » des époux après le mariage (article 26 du règlement du 24 juin 2016 sur les régimes matrimoniaux).

La jurisprudence interdit le recours au mécanisme du renvoi pour déterminer la loi applicable. Ainsi, la Cour de cassation a exclu l’application de l’article 15 du dahir du 12 août 1913 (arrêt Siboni, Cass. Civ. 1re, 3 décembre 1991). L’article 49 du Code marocain de la famille consacre la séparation des patrimoines : chaque époux conserve un patrimoine distinct. Ils peuvent néanmoins conclure un accord séparé de l’acte de mariage prévoyant une communauté d’intérêts ou de biens pour ceux acquis pendant la vie commune.

Comment sera réglée votre succession ?

Sur le plan civil

Depuis le 17 août 2015, le règlement européen n°650/2012 sur les successions prévoit que la loi applicable est celle de la dernière résidence habituelle du défunt (article 21). Ainsi, si un Français décède à Marrakech, sa succession sera en principe régie par la loi marocaine. Cependant, les règles de conflit marocaines renvoient souvent à la loi nationale pour la dévolution successorale.

L’article 18 du Code de la condition civile des étrangers prévoit l’application de la loi nationale pour la désignation des héritiers, l’ordre de succession, les parts, les rapports, la réserve et la quotité disponible. La loi française peut donc s’appliquer même à la succession d’un Français décédé au Maroc. Ce mécanisme de renvoi a été confirmé par la jurisprudence (affaire Forgo, Cass. Req., 22 février 1882).

Sur le plan fiscal

Il n’existe pas de convention fiscale franco-marocaine concernant les successions. Depuis 2007, aucune taxation n’est appliquée au Maroc sur les transmissions à titre gratuit. Aucune déclaration de succession n’est donc exigée localement.

En France, une déclaration doit être déposée auprès du service des impôts des non-résidents. Seuls les biens meubles et immeubles situés en France sont imposables, sauf si tous les héritiers sont domiciliés en France depuis plus de six ans au cours des dix dernières années, auquel cas la succession mondiale est imposable. L’absence d’impôt au Maroc rend inapplicable le mécanisme d’imputation prévu à l’article 784 A du CGI.

Testament : quelles règles au Maroc ?

Le droit marocain reconnaît le testament (wasiyya), mais en limite les effets. Le testateur ne peut modifier l’ordre légal des héritiers ni en privilégier un sans le consentement des autres. Le testament manuscrit est privilégié : il doit être rédigé et signé de la main du testateur. À défaut, il peut être établi par acte adoulaire ou reçu par une autorité habilitée. Les volontés exprimées oralement devant témoins sont également valables si elles sont consignées.

Notaires et adouls : quelles différences ?

Au Maroc, les notaires sont des officiers publics nommés par Dahir royal. Ils rédigent des actes authentiques en langue française, leur confèrent date certaine et force exécutoire. Les adouls, quant à eux, relèvent du droit musulman et rédigent des actes (mariages, divorces, ventes, successions) qui ne bénéficient pas de la même authenticité juridique. Pour les transactions ou procurations destinées à produire effet en France, seul un acte notarié est reconnu comme authentique.

Régime de protection des enfants mineurs

La Convention de La Haye du 19 octobre 1996, ratifiée par la France et le Maroc, détermine la loi applicable et la juridiction compétente en matière de protection des enfants. Depuis le 1er février 2011, les autorités marocaines sont exclusivement compétentes pour les enfants français résidant habituellement au Maroc.

Ainsi, un père français vivant à Casablanca avec ses enfants mineurs doit obtenir une autorisation du juge marocain des tutelles pour vendre un bien en France appartenant à ses enfants. Le père est le tuteur légal (article 236 du Code de la famille). En cas d’empêchement, la mère assume ce rôle (article 238). Certaines opérations nécessitent une autorisation judiciaire, notamment la vente de biens d’une valeur supérieure à 10 000 dirhams (article 271).

Procuration authentique au Maroc

Depuis le 1er janvier 2019, les consulats de France ne sont plus compétents pour établir des actes notariés. Toute procuration authentique doit être rédigée devant un notaire marocain. Ces actes sont reconnus en France sans légalisation supplémentaire, conformément au protocole additionnel franco-marocain du 10 août 1981. Une procuration adoulaire ne sera pas considérée comme authentique par les autorités françaises.

Conseil Atlasimmobilier

S’expatrier au Maroc implique des conséquences juridiques importantes, souvent méconnues, sur le patrimoine, la famille et la fiscalité. Anticiper ces questions avec des professionnels spécialisés est essentiel pour protéger vos intérêts et ceux de vos proches. Atlasimmobilier met à votre disposition son expertise et son réseau pour vous accompagner dans toutes les étapes de votre installation et de votre projet patrimonial au Maroc.